Parution du livre : Un militant socialiste de Castres au temps de Jaurès : Henri Bès

Jean Faury est historien de la laïcité. C’est aussi un familier de Jaurès et de son parcours de Castres à Carmaux, un Tarnais fidèle auteur de plusieurs ouvrages sur sa ville de Castres qu’il n’a jamais quittée. Il nous offre aujourd’hui une biographie abondamment documentée sur le destin d’un militant socialiste appartenant à sa famille, ce qui lui permit d’avoir accès, au-delà de la mémoire orale, à des sources privées très éclairantes, s’ajoutant aux sources publiques parfaitement dominées : rapports de police, presse locale et correspondances.

L’engagement des militants ouvriers de la fin du siècle avant-dernier est ici minutieusement analysé. Jean Faury montre comment l’action syndicale débouche alors nécessairement sur le souci de conquérir les municipalités des villes ouvrières, et suppose donc un vecteur politique. Celui-ci fut d’abord circonscrit à des groupuscules de tradition blanquiste, guesdiste ou libertaire, manifestant un vif anticléricalisme, et s’affirmant dans des grèves parfois dures. Ces pionniers ont animé plusieurs journaux locaux, mais le socialisme ne prit une tournure plus efficace que par l’accession au pouvoir municipal dans le sillage des maires radicaux tel Louis Vieu à Castres. Et c’est dans le cadre d’un poste de conseiller municipal en 1896 puis d’adjoint en 1900 que notre jeune ébéniste fait l’expérience de l’action sociale et laïque dans une ville industrielle alors très active mais où les crises économiques accusent de criantes inégalités sociales.

Jean Faury ne dissimule rien des clivages existant dans la gauche de l’époque, mais il met parfaitement en valeur l’exigence d’unité qui anime les ouvriers et qui rencontre les efforts en ce sens d’un Castrais déjà célèbre : Jean Jaurès.

JEAN FAURY ECRIVAIN

C‘est donc par la gestion municipale que Bès exerce ses premières responsabilités et au sein des municipalités radicales, prépare la conquête socialiste qui marquera ensuite la ville avec les Sizaire, puis après les longs mandats du radical Lucien Coudert et du gaulliste Jacques Limouzy, Jean-Pierre Gabarrou et Arnaud Mandement.

Bien plus difficiles ont été les élections législatives, compte tenu de la présence hégémonique -et héréditaire-dans les cantons ruraux de la circonscription de Castres des barons Reille, qui avaient déjà fait échouer le jeune Jaurès en 1889, avant d’occuper eux-mêmes le siège pour des décennies. Henri Bès, désigné comme candidat de la jeune SFIO en 1906, en fit l’amère expérience.

Mesurer la force d’un idéal à travers une vie politique intense mais souvent chaotique et perturbée par jalousies et zizanies, évoquer la diversité d’un Tarn industriel que l’on résume parfois, bien à tort, aux seules mines de Carmaux, suivre le cheminement d’un militant de base resté en contact avec Jaurès tels sont les apports d’un récit alerte.

Un militant socialiste de Castres au temps de Jaurès : Henri Bès
Editions Société des sciences, arts et Belles-lettres du Tarn, Albi,
184 p. 15 euros.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *